Le Chant du loup Antonin Baudry / 2019

Un jeune spécialiste acoustique de la Marine nationale commet une erreur d’analyse qui met en danger tout un équipage. En cherchant à la réparer, il se retrouve pris dans un conflit majeur…

Légers spoilers.
 

Énième candidat à l’éternelle utopie d’un “film populaire français réussi” (on croirait, à ce stade, que c’est un pays entier qui cherche l’Atlantide…), Le Chant du loup a pas mal d’arguments en poche pour être l’heureuse nouvelle que le cinéma national attendait tant.

Son premier geste bienvenu, c’est aussi celui qui fit la réussite du Bureau des légendes : une approche hyper-documentée du métier, fut-elle anti-spectaculaire (découverte des termes, des usages et des gestes d’une vie de sous-marin, dureté implacable des protocoles), qui parie sur le fait que cette authenticité grisâtre sera plus fascinante, pour le spectateur, que les clichés cinégéniques usés du genre. Les personnages ne restent pas assez professionnels pour que la formule fonctionne aussi bien que chez Rochant, et il y a un paradoxe à voir ce plaisir du détail vériste se marier à des court-circuits narratifs régulièrement invraisemblables. Mais on a néanmoins là une posture rigoureuse capable de tenir tête à la démesure du pitch.

C’est la seconde force du film : sa configuration narrative, qui lui donne une caisse de résonnance forte (l’horizon horrifique d’un conflit nucléaire, dont l’effroi n’habite sans doute pas assez la mise en scène), et un canevas dramatique particulièrement pur (cette manière dont le scénario oblige les personnages à se tuer les uns les autres, plutôt qu’à s’unir contre un illusoire ennemi). Et ce même s’il semble que tout cela soit plus au moins repiqué au USS Alabama de Tony Scott – ne l’ayant pas vu, je ne peux pas trancher.

Enfin, et c’est la plus belle trouvaille du film : un horizon poétique en la manière dont il concentre tout sur l’écoute, et sur ce métier (l’oreille d’or) aux accents mythologiques. Loin de l’imagerie viriliste associée aux représentations de l’armée, et porté par un François Civil qui donne au héros des airs d’enfant fragile au génie terrifié, le goût de l’écoute enrobe le film entier de crépuscule et de nuit (même au repos et à terre, le film est tout ténébreux), comme pour s’immerger dans un bain d’obscurité et mieux entendre.

Dommage alors, avec toutes ces cartes en main, que le cinéaste n’arrive pas à se délaisser des derniers oripeaux du film militaro-patriotique (personnage féminin transparent inclus), dont les clichés et mauvais réflexes empêchent à l’ensemble de pleinement déployer une identité qui lui soit propre. Entravant Le Chant du loup de tout devenir plus poétique, mystérieux, ou même accidenté, cette ligne conventionnelle achève définitivement le film dans un final embarrassant qui donne l’impression que le récit entier, bien revenu dans le rang, n’avait strictement rien à dire.

Encore un coup manqué, donc, à nos recherches d’Atlantide ; mais on était pas loin…

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