Battleship Island Ryoo Seung-wan / 2017

Pendant la Seconde Guerre mondiale, plusieurs centaines de Coréens sont emmenés de force sur l’île d’Hashima par les forces coloniales japonaises : un camp de travail où les prisonniers sont envoyés à la mine…

Légers spoilers.
 

Ce film, auréolé d’un culte encore semi-confidentiel, n’est pas celui qui me fera changer d’avis sur les tares du cinéma coréen. La virtuosité de l’entreprise est certaine (les deux heures passent en un souffle, mélangeant l’énergie de multiples genres, le suivi épique du bombardement puis de la bataille est indéniablement impressionnant…), et contrairement à nombre de ses collègues ayant œuvré dans le polar, Ryoo Seung-wan semble sincèrement accroché à ses personnages. Ceux-ci sont les fers de lance d’un lyrisme qui apparaît de fait moins artificiel qu’à l’accoutumée, moins frimeur, plus concerné – aussi grossier soient ses leviers (et paresseux les profils-types que chaque protagoniste vient sagement remplir).

Il reste qu’on a là qu’une différence de degré, et non de nature, vis-à-vis des habituels problèmes du cinéma coréen. Tant que l’horreur restera l’objet d’une mise en spectacle si complaisante (combien de temps avant que la gamine soit violée ?), tant que les arabesques de la caméra s’amuseront parmi les cadavres, tant que l’hystérie du jeu et le grotesque des affects feront ressembler l’ensemble à un carnaval (les japonais rieurs n’ont rien à envier aux pires caricatures de nazis), rien de ce cinéma ne pourra se résoudre. Et si la seconde partie, tendue par l’énergie de l’évasion, se fait un peu plus respirable, sa fibre épique ne sait s’exprimer que par l’exaltation outrée d’un nationalisme repoussant, qui rebute au centuple.

Aussi horrible que soit cet épisode historique, il méritait plus qu’un tour de manège, et qu’un film si soucieux d’appuyer avec toute la grossièreté dont il est capable sur les mamelles de notre indignation (on ne comprend pas autre chose, devant ce plan final et ce visage face caméra, plus morveux que chez Kechiche : allez, encore quelques seconde pour traire jusqu’au bout les sentiments patriotiques du spectateur). Doué ou pas, virtuose ou pas, divertissant ou pas – à ce stade de vulgarité et de répulsion, ça n’a plus grande importance.

Goon-ham-do en VO.

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