Je n’avais pas pris de nouvelles de Dupontel depuis Le Créateur, à une époque où son cinéma était encore associé à un geste un peu punk, production périphérique coincée quelque part entre le cinéma de la “nouvelle image” à trognes en grand angle (Besson, Jeunet, Kounen, toute une école rattachable à Gilliam), et une tentative plus frondeuse de renouveau du cinéma de genre français, qui entamait alors trois longues décennies d’échecs en série.
9 mois ferme, dans cette filmographie, semble être le moment pivot propulsant Dupontel au statut de cinéaste populaire (dépassant les 2 millions d’entrées), devenant de ce fait l’un des rares réalisateurs en France à savoir marier nécessités mainstream et ambition cinématographique.
Qu’en est-il concrètement ? Le résultat est mitigé. Par bien des aspects, Dupontel semble à la fois assagi (film moins rêche, moins bordélique, plus soigné, plein de couleurs et de mickeymousing musical), voire marqué par de curieux réflexes de cinéaste débutant, avec cette mise en scène illustrative toute en effets visibles (montage figurant tout ce qu’on évoque, prouesses de caméra inutiles qui donnent paradoxalement à l’ensemble une impression de petitesse). Le Dupontel cinéaste peine à donner du corps et du souffle à ce récit, par ailleurs réduit à son pitch (la courte durée du film en témoigne).
Dans ce cadre peu solide, beaucoup de numéros d’acteurs secondaires, même quand ils sont bons (Nicolas Marié en avocat nul, bègue et grandiloquent), semblent un peu pédaler dans le vide – et Dupontel acteur, pas très à l’aise, tout en intentions, n’y aide pas non plus. La subversion qu’il revendique, à ce stade, n’est plus qu’un élément de propos.
Le film néanmoins fonctionne à deux endroits sur lesquels, une fois n’est pas coutume, les Césars ont vu juste. Le scénario d’abord, pourtant invraisemblable (et exprimant un discours social trop appuyé), mais rempli de trouvailles tendres qui renouent avec les leviers de la comédie romantique classique. Et Sandrine Kiberlain ensuite, qui dépasse de très loin la commande comique pour peindre un personnage sincèrement investi, tout en émotions et en sensibilité, qui apporte au film maniaque un liant humain salvateur. Le moindre gros plan sur elle réveille la caméra ; et ce jusqu’à la fin, assez faible sur le papier, qui tient toute entière à la finesse de ses micro-réactions et de son bonheur solaire.
